Accueil Actu Zero Trust : pourquoi cette méthode de sécurité n’est-elle pas efficace ?

Zero Trust : pourquoi cette méthode de sécurité n’est-elle pas efficace ?

Professionnel informatique frustré devant des écrans d'alerte

Malgré une adoption qui ne se dément pas parmi les grandes entreprises, une réalité résiste : les failles continuent de surgir même après le déploiement des stratégies Zero Trust. Paradoxalement, certains organismes ne voient aucune diminution d’incidents, ou constatent même une recrudescence, alors que les budgets pour des outils pointus et des cabinets conseils atteignent des sommets.

Des faiblesses profondes subsistent souvent, entretenues par la complexité grandissante des environnements hybrides et la lourdeur des systèmes hérités. Derrière la sécurité « totale », le mirage tient encore bon, soutenu par des promesses marketing plus audacieuses que la réalité du terrain ne le permet.

Zero Trust : un principe séduisant, mais qu’est-ce que ça veut vraiment dire ?

La sécurité zero trust s’est solidement installée dans le vocabulaire des experts comme dans les discours de direction. Née sous l’impulsion de John Kindervag chez Forrester Research et structurée par le NIST, l’architecture zero trust bouscule les schémas habituels : fini la confiance accordée d’office, que ce soit à l’utilisateur, à la machine ou au service, où qu’ils opèrent. Chaque tentative d’accès devient un point de contrôle à vérifier, à authentifier, à passer au crible.

Pour cerner ce qu’englobe le modèle zero trust, il faut revenir à ses fondamentaux. Trois grands piliers structurent la démarche :

  • Vérification constante de l’identité (IAM, authentification multifacteur ou MFA)
  • Contrôle individualisé sur chaque utilisateur et chaque appareil
  • Segmentation adaptative du réseau (zero trust network), pensée pour stopper la propagation d’une menace

Le périmètre réseau classique disparaît : la fameuse barrière d’enceinte ne tient plus, chaque point d’accès devient une sentinelle à part entière.

Mais on aurait tort de réduire zero trust à une affaire d’outils. C’est tout un changement de paradigme qui s’installe : une requête doit prouver sa légitimité en temps réel, chaque usage requiert validation selon son contexte. Le NIST, comme d’autres influents cabinets, vantent la combinaison d’IAM, de MFA, de surveillance continue et de micro-segmentation. Pourtant, dans les faits, la greffe s’avère délicate dès lors qu’il s’agit d’intégrer tous ces principes à des infrastructures vieillissantes ou à des nuages multiples, foisonnants, hétérogènes.

Les promesses de la sécurité Zero Trust face à la réalité du terrain

L’adoption du zero trust est acclamée comme la parade ultime pour contrer une vague de cybermenaces montantes. Les discours sont sans équivoque : la surface de protection se restreint au strict nécessaire, et l’accès aux ressources devient un privilège minutieusement contrôlé. Les géants du numérique exposent leurs solutions comme des remparts capables de cloisonner, de surveiller, d’alerter au moindre soubresaut. Mais, une fois implantées, ces solutions se frottent à des réalités autrement plus coriaces : architectures touffues, explosion des services cloud, nécessité de maintenir l’activité sans ralentir la machine.

Lorsqu’on déploie le zero trust network access (ZTNA), un étonnant paradoxe émerge. L’architecture promet finesse et souplesse, mais elle repose sur l’orchestration de politiques d’accès rigoureuses, d’une gestion des identités sans failles, d’une maintenance continue. La moindre erreur dans la configuration, une faiblesse dans l’authentification, et c’est une faille ouverte à celles et ceux maîtrisant l’attaque avancée. Un trust zero trust sans rigueur renoue finalement avec la fragilité de l’ancien monde.

La pression règlementaire ajoute sa propre complexité : RGPD, HIPAA, impératifs DLP imposent une gymnastique constante entre fluidité des opérations et gestion fine des droits d’accès. Rêver d’une sécurité invisible et sans friction sur l’ensemble du trust network s’avère illusoire, tant les contextes diffèrent, tant les besoins évoluent à toute vitesse.

Pourquoi ce modèle ne tient-il pas toujours ses promesses ?

À première vue, le zero trust modèle impressionne : rejet de toute confiance implicite, qu’il s’agisse de l’utilisateur ou de l’appareil. Mais lorsque la théorie se frotte à la pratique, le modèle de sécurité zero trust montre ses limites. Derrière chaque tentative d’accès se multiplie une série de contrôles, de doubles authentifications, de vérifications administratives qui complexifient la routine aussi bien des utilisateurs que des administrateurs.

L’espoir d’une surface de protection resserrée se heurte à la disparité, souvent désordonnée, des systèmes d’information d’entreprise : applications métiers dépassées, réseaux hybrides, inventaire d’appareils souvent mal connus. Les règles d’IAM et de DLP exigent d’être adaptées et ajustées en permanence, chaque changement devient alors une nouvelle faille potentielle. Les métiers de la sécurité se retrouvent à piloter un véhicule lancé à grande vitesse dans une ville en construction permanente, et cela, parfois, se paie par une expérience utilisateur en net recul.

Plusieurs obstacles reviennent avec insistance sur le terrain :

  • Multiplication des frictions côté utilisateurs : MFA redondant, jonglage entre identités multiples
  • Cartographie difficile de la combinaison utilisateur-appareil et traçage précis des flux réseau
  • Charge de travail supplémentaire pour les administrateurs qui doivent s’assurer que le modèle zero trust reste cohérent à tous les niveaux

Le modèle zero trust vise un pilotage millimétré entre authentification forte et moteurs de règles. Or, plus les exceptions émergent, plus l’ensemble devient vulnérable : entre tension des métiers et raffinement des attaques ciblant l’identité, l’équilibre reste fragile.

Cadenas numérique entouré de câbles de réseau et de fuites de données

Mythes persistants et pistes pour une approche plus nuancée de la sécurité

En dépit des limites connues, le zero trust garde une aura de panacée : éliminer la menace interne, bloquer toute propagation latérale. Cette promesse, séduisante sur le papier, occulte les défis quotidiens liés aux environnements hybrides où les flux d’informations ne connaissent pas de frontières nettes. Ici ou là, certains RSSI s’accrochent à l’idée d’une opposition figée entre modèles passés et zero trust architecture, comme si la réponse se cachait dans un choix définitif. Cette posture enferme, alors qu’il faudrait justement sortir du binaire et évoluer vers des solutions ajustées à la réalité du terrain.

La confusion fréquente entre solutions ztna et VPN classiques n’aide en rien. Déployer une ztna zero trust à marche forcée laisse la porte ouverte à des déplacements latéraux discrets. Ce niveau de granularité vanté par le trust network access n’a de sens que si chaque maillon de la chaîne technique est solide et suivi. Ni l’automatisation, ni la technique ne dédouanent de la vigilance : il faut bâtir une analyse comportementale robuste, enrichie au fil du temps, pour sortir de l’autosatisfaction.

Face à la persistance de ces illusions, quelques mesures s’avèrent concrètes :

  • Établir une cartographie rigoureuse des accès, auditer les flux, définir les ressources prioritaires, la précision prime sur l’application aveugle de la doctrine
  • Refuser le confort d’une confiance technologique automatique, préférer une analyse continue qui dépasse la barrière de l’authentification
  • Mettre l’accent sur la formation, la sensibilisation aux spécificités de la zero trust sécurité, intégrer le facteur humain du début à la fin

La sécurité zero trust ne ressemble en rien à une recette miracle prête à servir. Ce sont ceux capables d’articuler technologies, comportements et réalités métier avec rigueur, qui garderont la maîtrise. Leur vraie force ? Questionner sans relâche ce qu’ils acceptent pour vrai, y compris en plein cœur de leur propre organisation.

ARTICLES LIÉS